vendredi 9 janvier 2015

ANNUS HORRIBILIS 2014



PARC DU MONT MÉGANTIC

En voyant ces images, vous avez peut-être eu une sensation de déjà vu, pourtant elles ont été prises un mois avant celles que vous avez vues récemment. Vous allez comprendre pourquoi j’ai attendu pour en parler quand je vous dirai de quoi il en retourne. Et pour ceux et celles que ma vie intéresse, je n’ai vraiment eu qu’un seul malheur en 2014 et c’est celui que je vais vous raconter ici.


Il y a un mois environ, j’étais au Mont Mégantic, secteur Franceville avec ma petite maman. J’avais loué un chalet pour deux : joli, tout vitré, avec un petit foyer écolo : très romantique, surtout avec ma mère que j’aimerai toujours. En arrivant près du parc, il tombait une petite neige floconneuse et diaphane, du genre qui reste collée aux troncs et aux branches des arbres et qui crée un décor absolument féérique. Aussitôt installés, nous sommes ressortis pour faire un très joli sentier qui longe le ruisseau de la Montagne (parfait pour ma mère de 85 ans) et que nous avons parcouru aller-retour à quatre reprises au cours de notre séjour; elle est en forme quand même.
  
Moi, la deuxième journée, j’ai escaladé la plus grosse montagne du coin, une butte en fait, mais au Québec, pas trop loin de Montréal, c’est tout ce qu’on trouve. Onze kilomètres en boucle, avec quelques très belles vues, ça s’appelle le sentier des Cimes. Rien d’essoufflant, surtout que je m’arrêtais pour faire de petits dessins. Malheureusement le retour est plutôt monotone, c’est un long corridor de quelques kilomètres, sur une route plate entourées de grands arbres. C’est joli, mais tellement tout pareil qu’à un moment je me suis demandé si je ne m’étais pas trompé de chemin. Si j’avais à la refaire, je remonterais simplement la montagne dans l’autre sens.

Par contre sur la montagne, j’ai commencé une migraine optique qui est tout de même passée assez vite. J’ai toujours eu ces migraines, mais elles sont beaucoup plus fréquentes depuis un an. Environ une fois par semaine il m’apparaît une sorte de feu d’artifice dans les yeux, et je ne vois plus rien au centre de mon champ de vision. Après quelques minutes le cercle s’élargit puis finit par disparaître. Pour vous rassurer, je ne suis jamais totalement aveugle, mais peut-être à 15 ou 20%. Paraît que ça peut donner des maux de tête, mais dans mon cas, à peu près rien la plupart du temps.



De retour au chalet, j’ai préparé le souper, on a mangé et comme il n’y avait rien d’autre à faire je me suis étendu sur mon lit pour pratiquer ma musique (je chante avec le chœur de l’Orchestre Métropolitain). Il faut préciser que le chalet est vraiment petit, il n’y a pas de fauteuil. Il y a bien une sorte de « beanbag » sur lequel j’ai essayé de m’asseoir mais il glissait et était si bas que pour se relever, à mon âge, ça prend de l’aide et comme ma mère est encore plus vieille que moi, on s’est abstenu.

Bon, venons-en aux faits, après avoir répété mes partitions, j’ai commencé à lire, mais les lettres se sont mises à danser devant mes yeux : impossible de déchiffrer ce que je voyais. Je voyais les lettres, mais impossible d’en faire des mots. J’avais beau essayer, rien à faire, exactement comme avant qu’on me donne de la cortizone au début de 2013, à l’époque où on m’a annoncé que j’avais une tumeur au cerveau.


Puis, je me suis tourné vers ma mère, je lui ai dit « Thomas », le nom de mon fils, puis « Martine » le nom de mon ex et finalement « Maman ». Je sentais que ça n’allait pas. Je m’exprimais normalement, mais lorsque j’ai essayé de nommer ce qu’il y avait devant moi, mon chapeau et mon manteau, impossible ! J’avais beau essayer, rien à faire. Je ne paniquais pas, c’était un peu irréel. J’ai fini par demander à ma mère comment s’appelaient ces objets, elle me l’a dit, mais toutes les choses autour avaient perdu leur nom. Il n’était que huit heures, mais on a décidé de se coucher. Je sais que la mémoire m’est revenue éventuellement, mais je me suis endormi là-dessus.

Le pire là-dedans, c’était de voir ma mère qui devait s’imaginer prise seul avec cet handicapé du cerveau, au milieu de ce qu’on appelle toujours nulle part et qui, comme par hasard, est toujours là où on se trouve, suis-je clair? Surtout qu’elle avait essayé, sans succès, de conduire ma grosse « van » cet après-midi là. J’imagine qu’elle se voyait courir à en mourir pour aller demander de l’aide aux chalets voisins, comme dans un mauvais film, au ralenti, avec de la grosse musique dramatique.


C’est drôle, quand c’est arrivé, c’est elle qui était solide, mais, le lendemain c’est moi qui ai dû la rassurer. Je me sentais tout à fait normal, en contrôle, mais un doute subsistait quand même dans mon esprit : ça pouvait m’arriver, encore, soudainement. Par contre, je savais que ça n’affectait qu’une infime partie de mes capacités, puisque avant que je ne sois diagnostiqué je menais une vie presque normale avec mes pertes de mémoire.

Cependant, quelques jours plus tard, j’ai eu l’impression, qui s’est confirmée, d’avoir perdu une petite partie de ma vision. J’en avais déjà perdu un peu sur le côté gauche, mais là, c’est devant. Un minuscule point, comme si j’avais en permanence une lueur de flash gravé sur la rétine.


Aussi, je devais voir mon médecin à la mi-décembre, après avoir passé une autre résonnance magnétique, mais ces personnes qui sont en général fiables m’ont oublié. Alors pas de résonnance, donc pas de médecin non plus. Je le verrai sûrement en janvier, mais comme je n’ai pas eu d’autre phase amnésique, je ne m’en fais qu’à moitié.

On est revenu le lendemain de cet évènement, sans anicroche, avec un arrêt pour manger à Sherbrooke, sur la rue King ouest. Je ne sais pas s’il y a un endroit dans cette ville qui est en effervescence, mais ce n’était pas celui-là. Même si Auguste, le resto du jeune chef branché est juste là ; il y a presque un commerce sur trois de fermé.

Alors j’attends mon prochain rendez-vous avec le doc, car j’ai eu ma résonnance juste avant Noël, et je vous tiens au courant.






















Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire