J’ai subi
une autre résonnance la semaine dernière et cette fois-ci, je n’ai pas aimé ça.
Pas que j’aie souffert, pas du tout. C’est que, comme je vous l’ai dit, je
venais de voir mon doc, qui m’avait dit que tout allait bien, que rien n’avait
bougé et voilà qu’on recommence, si vite, mais avec un appareil plus bruyant et
plus puissant, paraît-il, et que je le revois cette semaine. Que vont-ils aller
chercher de plus avec cet appareil, je n’en sais rien, mais ce n’est pas
rassurant.
Alors,
re-épée de Damoclès, re-stress, et dans le tunnel, je me disais : c’est ça
ta vie maintenant, vivre ou survivre en attendant que le ciel te tombe sur la
tête.
Je sais,
c’est la vie de tout le monde, d’ailleurs depuis que j’en sais un peu plus sur
ma date de péremption, je n’en reviens pas de tous ces gens qui tiennent à me
précéder dans le grand vortex éternel. Des plus vieux, des plus jeunes, qu’ont-ils
à vouloir me voler la vedette? Ils auraient pu attendre, on m’avait dit que c’était
bientôt mon tour, soyez patients que diable.
Même
Frédéric Metz, que j’avais vu en pleine forme il n’y a pas si longtemps alors
que nous avions rendez-vous le même jour à l’hôpital, a préféré partir avant
moi.
Il n’y a que
Jean Charest, qui ne semble pas vouloir me précéder, paraît même qu’il prépare
un retour en politique au fédéral. Imaginez un printemps érable à la grandeur
de pays, ce serait génial. En tant que premier ministre du Canada, il pourrait même envoyer l’armée là-dedans pour
taper sur les manifestants. Le chaos qu’il créerait serait assez pour que je
désire rester un peu plus longtemps, il est insurpassable.
Bon, soyons
sérieux, je ne veux pas tant que ça que ce soit mon tour, ou j’aimerais le
savoir pour de vrai, mais on est dans le flou. Dans mon cas, c’est un peu plus
concret que pour le commun des mortels, mais encore trop vague, et me retrouver
là, à l’hôpital, en jaquette bleue, avec les maganés de la vie, les grabataires
à la peau verte, avoir franchi cette porte qui s’est refermée sur moi, ça me
mettait en colère. Laissez-moi redevenir un être humain normal, je veux aller à
la banque demander une hypothèque, je veux poigner des contraventions encore
longtemps, je veux aller acheter du linge qui me fera encore dans dix ans, je
veux me trouver une blonde, juste pour pouvoir me chicaner avec elle, n’importe
quoi pour avoir une vie normale encore un peu.
Le pire dans
tout ça, c’est que je n’attends plus dans les salles d’attentes, ce qui
signifie plus de petits dessins et ça, ça me frustre encore plus. Je sais, je
suis anormal. Si j’étais ministre
de la santé, je demanderais que l’attente soit d’une demi-heure minimum dans
tout le réseau, pas seulement à l’urgence et j’obligerais les gens à faire
quelque chose de ce temps: lire, dessiner, même écrire le roman de leur vie,
plutôt que de rester là le regard vide ou pire fixé sur un écran de télé
diffusant les émissions de TVA. Ils peuvent bien trouver que c’est long!
Je reviens
sur Frédéric Metz que je ne connaissais pas tant que ça, même si c’est lui qui
m’avait embauché pour enseigner le dessin à l’UQÀM il y a des lunes. Il était aussi
flamboyant et verbomoteur que je ne le suis pas, mais je peux grandement
apprécier son apport au monde du design et cette ville serait infiniment moins
laide si on avait suivi ses conseils plus souvent.
Alors, je
vous reparle après ma visite en onco demain.
As-tu quelqu'un qui t'accompagne lors de tes rendez-vous?
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