mercredi 6 mai 2015

VOYAGE À PARIS ET LONDRES / VICE-VERSA

JE VAIS PRENDRE L'AVION POUR LONDRES, DANS LE TRAIN UNE DAME QUI FUME ET LE DÔME UNE "POSH PLACE". LES POSTIERS SONT EN GRÈVE, ILS BARBOUILLENT LES TIMBRES.
PARTIE 2- LONDRES

Alors, arrivé à Gatwick, on me demande si j’ai mon billet de retour pour le Canada. Les illustrateurs sont toujours suspects semble-t-il, les douaniers ne comprennent pas ce que nous faisons et, surtout, ils ne semblent pas comprendre que l’on puisse travailler de chez soi pour l’étranger.

Puis, je prends le train jusqu’à Victoria Station et marche jusque chez Richard Parent, un peu loin, mais je hais les taxis (pas parce qu’il faut payer, mais, parce qu’il faut parler à quelqu’un), alors je me tape 40 minutes de marche avec mes valises et ce avant l’invention des roulettes, mais marcher et découvrir la ville en même temps, ça n’a pas de prix. Je me souviens encore de l’adresse, « number 7 Priory Walk, London SW10 ». Faut dire que j’y ai envoyé une centaine de mes cartes postales, tellement que celui qui les recevait a fini par croire qu’elles étaient à lui. Mais, ça c’est une autre histoire.
LA SALLE DE BAIN DE L'APPARTEMENT DE RICHARD ET JOCELYNE FOURNEL AVEC VUE SUR LE JARDIN, FAIT LORS D'UN AUTRE VOYAGE. OEUVRE AUJOURD'HUI DANS LA COLLECTION DE PIERRE DURAND.

L’appartement était un demi-sous-sol un peu sombre mais très coquet et sympathique, dans un beau coin de la ville. Mais, Rick n’était pas content, il n’avait pas l’argent pour aller voir l’expo à Paris et il n’avait pu obtenir une bourse de déplacement, alors, il était frustré et je me sentais mal d’être là, alors que lui aurait voulu être à Paris. Et pendant ce temps, mes copains dans l’Hexagone s’occupaient de l’exposition en mon absence, pas nécessairement contents de ça et je les comprends.
 
LA BELLE JOCELYNE À L'OREILLE COUPÉE ET "AN ANGUISHED RICHARD" QUI FUMAIT ET BUVAIT CAFÉ SUR CAFÉ.
Ma raison d’être ici, était que Londres était à ce moment-là, la Mecque de l’illustration novatrice et grâce aux contacts de mon ami, j’ai pu montrer mon portfolio à quelques personnes importantes. Par contre, je dois avouer que ça n’a rien donné. Le seul contrat que j’ai eu, plus tard, m’est venu de la revue Lire à Paris, cocasse, quand même!
RICK DANS SON APPART ET UNE VUE DE LA TAMISE.

C’était un peu le jet-set, la classe économique du jet-set, disons. J’ai d’abord rencontré les copains de travail et la patronne de Jocelyne Fournel, la blonde de Richard, qui travaillait au Telegraph. On a pris un verre et mangé au Dôme. Bon, je ne vais pas vous énumérer tout les directeurs(trices) artistiques que j’ai pu rencontrer par après, des gentils et des moins accueillants, mais, c’est quelque chose qu’il faut faire si on veut se faire connaître.

Un mot que j’ai retenu de mon ami est « posh » qui signifie « chic » pour les Brit. Àlors, Richard m’emmenait de « posh place » en « posh place ».
J'AI DÉCIDÉ DE PASSER À LA COULEUR, JE M'ENNUIE VITE, MAIS J'UTILISAIS DU BRISTOL, UN PAPIER TRÈS LUSTRÉ DIFFICILE À CONTRÔLER. PETITE SÉRIE DE DESSINS RATÉS.


Autre soirée branchée, j’ai soupé un soir chez Benoit Jacques, avec Jean Christian Knaff et Jeffrey Fisher et bien sûr Richard et Jocelyne, tous des gens qui feront une très belle carrière et nous passerons la soirée à parler de Londres et du mal du pays puis, contre les autres illustrateurs. Puis, retour en Jaguar dans le bolide de JC, la vie de star !
OEUVRES DE BENOIT JACQUES EN HAUT ET DE JEFFREY FISHER EN BAS.

Jean-Christian Knaff était français d’origine, d’abord professeur d’anglais, il s’est tourné vers l’illustration, lors de son séjour au Québec, je pense. Il partageait un atelier avec Richard et Philippe Béha. C’est lui qui le premier est venu à London et Richard l’a suivi. Mais, je me souviens que mon ami était extrêmement jaloux des succès de J.C. qui avait un style naïf et coloré beaucoup plus accessible que ce que faisait Rick.
JEAN-CHRITIAN KNAFF, L'AFFICHE À GAUCHE AVAIT CRÉÉE UN PETIT SCANDALE À L'ÉPOQUE.

Au cours de nos errances, nous avons visité une exposition de l’œuvre de Diego Rivera dont j’ai beaucoup aimé les nus de femmes primitifs et sexuels, j’étais déjà comme ça à cette époque on dirait. Aussi, vu l’expo époustouflante d’un autre dessinateur de voyage du nom de Cristopher Corr, mais dans un style totalement ludique et coloré, à l’opposé du mien. Mais je trouvais qu’il dessinait tout avec le gros bout de la lorgnette, ça manquait de portraits. Je me disais que lui et moi on se complèterait bien. Lors d’un voyage subséquent je le contacterai et on ira lunché ensemble, mais, ça ne cliquera pas entre nous.


J’apprends que Lady Di et le Prince Charles se séparent.

Quelques mots sur Richard, qui fût un très grand ami à moi pendant une dizaine d’années. C’était un être intense, dont le but était ni plus ni moins de révolutionner le monde de l’illustration. Je me revois encore à la Croissanterie sur Hutchison, avec lui, à prendre un gros café au lait, moi qui n’en buvait jamais. À la fin avec la caféine et son discours inspirant, je voulais grimper dans les rideaux. Son problème était qu’il voulait tout avoir, mais, sans faire de compromis. Quand les gens lui disaient que son style était trop sombre, c’était eux qui avaient un problème.
OEUVRES DE RICHARD PARENT.

Il est revenu au Québec, un peu obligé et frustré. Sa carrière allait bien, mais pas assez pour qu’il puisse en vivre à Londres, une des villes les plus chères au monde et comme je vous disais, c’était sa façon de voir qui primait. C’est tout en son honneur, mais ça ne fait pas un gros compte en banque. En plus, j’ai eu l’impression qu’à son retour, il aurait voulu qu’on l’accueille comme une vedette, disons, qu’il a été un peu déçu.

On ne s’est revu que quelque fois après son retour, dont la dernière, quand il est venu me demander de l’argent pour la revue qu’il voulait créer et qui allait s’appeler « Noir ». Ça lui ressemblait. Après sa mort d’un cancer de la tuyauterie, je pense, j’ai fait une petite sculpture qui le représentait en Don Quichotte, avec une tête de mort qui lui sortait du ventre. Je pense qu’il aurait apprécié.

Il est mort très jeune, à 35 ans.

Finalement, retour à Paris. Dans le RER je vois des jeunes gens insultés un jeune homme à cheveux longs, probablement d’origine Indienne. En sortant, ils lui cracheront dessus par la fenêtre en le traitant de pédale. Courageux, ces jeunes gens! Le Pen n'était pas loin.





MOMO, MOI ET PÔL TURGEON, JE NE SAIS PAS D'OÙ SORT CETTE PHOTO.























1 commentaire: