mercredi 26 février 2014

Mon père 1


LA MORT DE MON PÈRE

 
Non, mon père n'est pas décédé récemment, mais il y a 13 ans et sa mort ne fait pas parti de mes malheurs de 2013, elle ne fait même pas parti de mes malheurs du tout. Je le sais, je suis un sans-coeur.


Mon père a été atteint d'un myelo carcinome. Le myélome (multiple) est une tumeur, impliquant le « myélo », ou les cellules produisant le sang dans la moelle osseuse.  La moelle est présente dans la cavité à l¹intérieur des os de la colonne vertébrale, du crâne, du bassin etc.C'est en allant voir un chiropraticien pour un mal de dos qu'il s'est fait pulvériser certaines des vertèbres affectées et qu'il a abouti à l'hôpital pour se faire dire qu'il avait un cancer. Il avait 72 ans.



Je n'étais pas très près de mon père et aller le voir chez lui était un vrai pensum. On s'installait dans le salon et avec le bruit de la télé en arrière-plan, on échangeait des banalités jusqu'à ce que je considère qu'il était raisonnable que je puisse partir. Son émission favorite était « Xéna la guerrière », une pseudo héroïne grecque qui se promenait à moitié nue pendant une heure en se battant avec des méchants. Je ne sais pourquoi mais j¹avais toujours l¹impression d¹arriver chez lui pendant que ça jouait.  


À le regarder «vivre», je me suis demandé pourquoi il tenait tant à ne pas mourir. Il me semble qu¹en vieillissant on s¹accroche à bien peu de choses.

Dans la même veine, j'ai déjà entendu une dame qui attendait pour un traitement de chimio et qui trouvait que l¹attente était longue, dire à sa voisine: «J'ai assez hâte d'être chez nous pour écouter mes émissions». Comme si le but d'une vie pouvait se résumer à respirer, manger et regarder la télé.  Et on nous dit supérieurs aux animaux.


Je me souviens que mon père souffrait beaucoup au début, je le revois dans son lit les mâchoires et les poings serrés, c'était pénible à voir. Si j'avais su ce que je sais aujourd'hui, je serais intervenu plus directement pour qu'on lui administre quelque chose pour le soulager. Je ne savais pas à l'époque l'immense panoplie de drogues et de médicaments qui existe pour soulager et qu'il faut demander pour recevoir, car les infirmières sont souvent débordées.

Le médecin qui nous a annoncé qu'il allait mourir, ne gagnera jamais un prix de diplomatie. On était ma sœur et moi au chevet de mon père qui sommeillait et ce bon docteur nous dit simplement : "Soixante-douze ans, c'est jeune pour mourir". Et vlan dans la gueule! Je me suis senti vaciller, mes jambes ont ramolli, mais je suis resté debout tout de même estomaqué par le manque d'à propos de cet homme. J¹imagine que pour lui, annoncer la mort de quelqu¹un à ses proches est devenu banal, alors que ceux à qui il l¹annonce ne l¹attendent peut être pas. (À suivre)





vendredi 14 février 2014

Annus horribilis (épisode 4)

    
ANNUS HORRIBILIS 
(suite 2)

Voici un petit texte que j'ai écrit le 10 mars 2013 et qui vous donne une idée de comment je me sentais au début de ma chimio:

"Quatre jours de radio, six de chimio et je suis proche de la mort (soyons dramatiques). Sérieusement hier, je ne voulais que dormir, mais c'était d'un sommeil pénible, fiévreux. Le contraire de ce qu'on appelle un sommeil réparateur.

J'ouvrais les yeux pour les refermer aussitôt. Je ne sais pas s'ils m'ont laissé assez de temps pour me remettre de l'arrêt de mon Décadron, toujours est-il que ça me tombe dessus comme une tonne de briques.

Il me reste encore vingt-six jours de radio et plus que ça de chimio à tirer, j'ai peur que ce ne soit fort pénible. Demain je me fais faire une prise de sang, alors je saurai si je manque de fer, ce qui est fort possible, car être aussi fatigué aussi vite il me semble que ce n'est pas normal."

C'est étrange j'avais totalement oublié cette souffrance, tout ce dont je me souvenais c'est que pour la chimio, c'était de jolie petites pilules colorées que je prenais chez moi. Elles valaient à peu près 100$ chacune. Je n'ai pas calculé, mais ça a dû coûter autour de 50 000$, est ce que je méritais ça? Et si ma tumeur se remet à gonfler, on remettra ça. Je vais ruiné notre système de santé à moi tout seul.

Et le manque de fer, ça n'avait rien à voir avec ma fatigue, c'était qu'on m'avait coupé le Décadron de façon trop brusque. On ne m'avait rien dit sur les effets secondaires de ce médicament, ni pendant que je l'utilisais, ni après. Il faut toujours poser des questions, on dirait qu'ils nous en disent le minimum.

Aussitôt qu'on m'a fait reprendre cette merveilleuse drogue, ce fût sans problème. Donc par ici le traitement, j'en aurais pris encore. Rien à voir avec ceux qui ont un vrai cancer et qui se font souvent charcutés, mais assurément entubés à l'hôpital à chaque semaine pendant des siècles.

Quant à la radiothérapie, ce n'était pas de jolies petites pilules, mais de jolies jeunes dames, toujours souriantes qui me donnaient mon traitement cinq jours par semaine. Dix minutes, sans douleur, zap et c'était fini. Le plus difficile était de respirer avec la sorte de masque de hockey qu'ils vous fixent sur la tête.
 
Il y a même une des préposées qui m'a dit que j'étais un beau monsieur, c'est bon pour le moral. Elle m'a même montré le tatouage de dragon qu'elle avait dans le dos (en partie). Par contre, ces dames m'ont fait une coupe de cheveux que je n'ai pas aimé. Elles m'ont fait tombé tous les cheveux du côté de ma tumeur. Je leur ai bien demandé de m'égaliser ça, mais elles n'ont jamais voulu.

Au sujet du Décadron, je vous ai aussi dit que quand on me le coupait, j'en avais pour un mois à me remettre de l'énorme fatigue que ça me causait. Je me suis trouvé une belle image pour illustrer ça: je me disais que c'était comme monter en avion puis se faire pousser dehors sans parachute. L'arrivée au sol doit être plutôt douloureuse.

POUR ADULTES SEULEMENT

DÉSIR ET PERTE

Ce dont je ne vous ai pas parlé cependant, c'est de la perte de tout désir sexuel en janvier de l'an dernier. Pas que j'avais vraiment besoin de désir à ce moment là, mon couple allait plutôt mal. En fait, au début, je croyais que c'était le choc de la nouvelle de la maladie. Je n'avais pas vraiment réagi à ce moment là, j'étais plutôt curieux, un peu comme si on me parlait de la maladie de quelqu'un d'autre, mais peut être qu'au fond de moi, j'avais la trouille.

Mais non, c'était en fait mon vieil ami le Décadron. Toute l'énergie qu'il me donnait ailleurs, il me l'enlevait entre les jambes.

Quel malheur? Non, quel bonheur! Un vrai rêve, il y avait enfin de la place dans ma tête pour autre chose que des pensées sexuelles. Je ne sais pas comment c'est pour les autres hommes, en fait je le sais un peu, mais je me demande si mes amis parlent de sexe parce que tous les hommes sont comme ça ou s'ils sont mes amis parce qu'ils parlent de sexe comme moi et que tout les autres hommes pensent plutôt au hockey ou à leur char.

Je ne sais pas si j'étais normal avant (et maintenant, car c'est revenu, pour le meilleur et pour le pire) ou si je l'étais plus avec pas de queue. Il faudrait que je relise le rapport Hite pour savoir où se situe la normalité.

Bien sûr j'exagère un peu, j'ai encore un peu de place dans ma tête pour quelques autres pensées que sexuelles, mais si je dis ça, c'est seulement pour ne pas vous faire peur si je vous rencontre.

En fait, c'est peut être connecté à mes désirs de performance. Avant, j'étais comme tout le monde à essayer de me dépasser comme disent les commerciaux, c'est beaucoup moins vrai maintenant. C'est d'ailleurs ce qui me manque le plus, j'ai beaucoup de difficultés à me raccrocher au train normal de la vie.

Étrange car aujourd'hui, j'ai autant de désir qu'avant sauf que ce sont ces désirs qui ont été secondaires toute ma vie qui prennent le dessus: écrire, cuisiner, et la musique.

Pour finir, en rapport avec l'impuissance, j'ai eu une idée géniale pour mettre fin aux abus de certains prêtres sur les enfants: leur administrer du Décadron. Non seulement, ils n'auraient plus envie de, mais en plus ils auraient une énergie sans borne pour accomplir leur ministère. On pourrait aussi reconnaître ceux qui en prennent à leur bajoues, comme Mgr Turcotte, ainsi on saurait d'avance avec qui nos enfants sont en sécurité.

P.S. Le dessin, c'est le dernier autoportrait que j'ai fait, au moment ou mes cheveux ont commencé à tomber  

À suivre



vendredi 7 février 2014

Atelier de portrait 1

PORTRAITS


En 2012, à l’annonce de la maladie que vous savez, j’ai à peu près cessé de dessiner. Je ne sais pas vraiment pourquoi. Je vous ai parlé de l’obligation que je ressentais de dessiner, de toujours avoir un crayon à la main, partout toujours et que je me sentais bien d’en être libéré.

En 2013, j’ai dû faire environ vingt dessins, dont dix cartes postales en voyage, bien peu pour la machine à dessins que j’étais mais aucune illustration. L’illustrateur en moi est bel et bien mort.

Par contre, il y avait un domaine du dessin que je n’avais pas exploré : le portrait. Comme mon bon ami Alain Massicotte s’occupe d’un atelier de portrait, justement, qui à lieu tous les lundis de 18h à 21h au Centre Culturel Georges Vanier, 2450 Rue Workman à Montréal près de Notre-Dame et Atwater, j’ai sauté sur l’occasion : il faut bien s’occuper.

Et bien sûr, si ça vous intéresse, c'est ouvert à tous, nous posons chacun notre tour, et on cherche toujours de nouvelles têtes à dessiner ou à abimer, c'est selon.

Voici le résultat de mes tentatives d'essais.






mercredi 5 février 2014

Annus horribilis (épisode 3)

  

FINI LES MALHEURS (ou presque)



Avant d'aller plus loin dans ma liste de malheurs de 2013, j'aimerais vous dire que les choses vont beaucoup mieux pour moi en 2014. Par exemple, hier mon chien s'est fait frapper par une voiture roulant à au moins 60 km/heure. Elle a été frappée par le pare-choc assez bas du véhicule et a glissé quelques mètres sur la chaussée mouillée et glacée et miracle, elle n'avait rien, pas même une égratignure. Par contre elle saignait de la ..., mais non c'est une blague.

J'espère qu'elle a compris quelque chose, moi oui: ne plus la laisser aller sans sa laisse. C'est une chienne tout à fait douce et tranquille en temps normal, mais si des êtres humains ou des chiens envahissent son territoire, c'est la folie. Cette fois c'était un couple qui promenait son animal sur le bord de la route à la campagne. Maya se précipite sur ces intrus en jappant. Je crie, je menace, elle finit par revenir, je suis soulagé, mais elle repart aussitôt et c'est là que la voiture est arrivée et que devant mes yeux, elle l'a happée. En la voyant glisser je pensais à blessures, mort, vétérinaire, dollars, mais elle s'est relevée immédiatement, est venue vers moi la queue entre les jambes, sans même boiter, un miracle!

La guigne m'a officiellement quittée vers la deuxième semaine de janvier, quand le rhume que je traînais depuis le premier est disparue. En fait, j'exagère, je ne suis pas encore chanceux, mais moins malchanceux quand ça va mal.

Exemple, j'ai fait un petit voyage avec mon fils et dès la deuxième journée, nous avons reçu un caillou dans le pare-brise projeté par un camion. Minuscule petite marque dans la vitre, mais comme je venais de le faire remplacer, je ne voulais pas que ça m'arrive encore. Cinq minutes après l'évènement, on croise par hasard un Lebeau vitre d'auto, je décide de m'y arrêter. Ça vient d'ouvrir, beaucoup de clients, personne au comptoir. J'attends quelques minutes, puis je me dis que si ils sont si occupés et débordés ça risque d'être long, alors je prends la chance que la fissure ne prenne pas d'expansion et je m'en vais. Je ne veux pas hypothéquer mes vacances en partant. Pour l'instant trois semaines plus tard, rien n'a changé. Ouf!

Autre malchance chanceuse, au retour du voyage, le long du fleuve, mon fils et moi on s'arrête pour dîner dans le stationnement d'un club de danseuse fermé. Pendant qu'on mange, une dame vient se stationner directement à côté de nous et grignote une pomme.

On se demande bien quelle idée lui a prise, surtout que mon fils voulait aller faire pipi dans la nature, c'est raté.  Après le lunch on sort chacun de notre côté, je vais porter des choses dans le coffre arrière de ma van. En fermant le coffre, j'entends mon garçon me crier quelque chose, mais je termine mon mouvement et nous voilà embarrés dehors à moins 5 degrés avec seulement un coton ouaté sur le dos et nos deux cellulaires dans l'habitacle. Malheur!

Heureusement la petite dame est toujours là. On lui raconte notre mésaventure, elle nous prend à son bord et nous amène au village. Premier garage fermé, semble-t-il, on va au suivant, fermé. On revient au premier, il y a quelqu'un finalement. Il est midi trente. D'ordinaire ils ferment à midi le samedi, mais un jeune homme au survêtement fort sale et usé est là. Son premier véhicule n'a pas assez d'essence, dit-il. On prend la remorqueuse qui elle aussi peine à partir en crachotant.

Il avait le kit complet du parfait cambrioleur de voitures. Il sort une plaque de plastique qu'il introduit dans le coin arrière gauche de la porte du passager. Puis un autre au dessus à l'horizontale. Finalement, il crée une ouverture dans la porte en forçant un peu, il y glisse un truc en caoutchouc, genre sac à pet qu'il gonfle et là il sort de ses outils une longue tige de métal avec un crochet au bout qu'il glisse dans l'ouverture ainsi créée et deux secondes plus tard, la voiture est déverrouillée. Je n'ai jamais payé une quarante dollars avec autant de joie.

Bon, je vais poursuivre avec une petite critique d'art. Tout ce que vous venez de lire m'est arrivé en revenant vers Québec et savez-vous ce qui se passe à Québec? Je parle sur le plan culturel bien sûr, moi pas. C'est en y allant la semaine dernière que je me suis rendu compte qu'il y a là une exposition qui m'a coupé le souffle et presque, je dis bien presque donné le goût de me remettre à dessiner.

Bon début pour 2014, n'est ce pas!

PETITE CRITIQUE D'EXPOSITION EN PASSANT


Nous étions à Québec pour une journée et demie. Au départ, je voulais visiter les deux principaux musées de la ville, mais après avoir vu l'exposition du Musée des Beaux Arts, j'étais plus qu'heureux et satisfait. Le Musée de la Civilisation ce sera pour la prochaine fois.

Donc, j'ai vu la collection William S. Paley, un riche américain fondateur de CBS, l'empire médiatique et membre du conseil d'administration du MOMA. Je vous jure, il n'y a la que des chefs d'oeuvre. Un impressionnisme qui n'a rien à voir avec le côté joli qu'on attribue trop souvent à ce qui est devenu une école.


Donc, merveille que ce fusain de Degas, ce portrait en pied de Toulouse-Lautrec et ces toiles de Cézanne le père de l'art moderne et ces deux peintures de Gauguin à deux époques différentes mais toutes deux tellement originales. Quelles jouissances pour les yeux!

C'est là jusqu'au 16 février et si vous la ratez ça va vous couter un voyage à New York.

Et passant, si vous voulez aller au meilleur restaurant de sushis au Québec, il est à Québec, justement et juste à côté du musée sur la rue Cartier. C'est le Métropolitain, rien à voir avec ces truc fusions qui vous offrent de la friture et encore de la friture, avec du fromage à la crème et du poisson fumée. Non, je parle de poisson frais, que ça, mais tellement frais et délectable. C'est à ne pas manquer!






samedi 1 février 2014

Annus horribilis (épisode 2)

ANNUS HORRIBILIS (suite)


D'abord découverte de ma tumeur. On l'a découverte en 2012, mais disons que ça a eu quelques incidences sur l'année suivante. Elle porte le nom magnifique de oligoastrocytome. Oligo préfixe signifiant petite quantité. Ici je m'insurge, car comme je l'ai vue, je sais fort bien qu'elle n'est pas petite. Astro préfixe référant aux astres, ici je parlerais plutôt de désastre et cytome "les systèmes cellulaires, sous-systèmes et composants fonctionnels du corps". Ici rien à dire, je n'y comprends que dalle, comme dirait mon fils.

Réflexion en passant, comme on sait que l'étymologie de la plupart des maladies vient du grec, je propose de boycotter toutes les places à souvlakis et les pizzerias aussi tant qu'à y être, puisque la plupart appartiennent à des grecs de toute façon. Ça leur apprendra!

On m'annonce ma mort prochaine, mais ça ce n'est pas un malheur puisque comme j'étais drogué, j'ai pris ça avec le sourire. Mais depuis ce temps ça traîne en longueur, un an déjà.

4 janvier, on me fait une biopsie de la cervelle mais en pure perte puisqu'ils ne pourront jamais déterminer vraiment de quel grade est ma tumeur. Je pense qu'ils vont y aller à l'oeil et m'accoler le grade 3, le pire.


20 janvier, la mort ne veut pas encore de moi, même si je ne l'ai jamais frôlée de si près. Nous sommes à notre petit chalet près de Richmond. La fin de semaine avait été douce, le mercure frisait le zéro, mais on annoncait un refroidissement dramatique. Comme de fait, le dimanche midi, le mercure s'est mis à chuter et le vent à s'élever. Quelques vénérables vieilles branches sont même tombées de l'arbre près de la maison.Il valait mieux décamper le plus tôt possible. La suite nous prouvera que nous aurions dû attendre, mais, peut-on savoir?

La première partie du voyage se fait sans problème, nous étions sur la 55, il ventait bien un peu, mais rien de bien dérangeant. Même une fois sur la vingt en direction de Montréal, tout est calme encore. À ce moment là, je décide de me reposer un peu. Je savais que j'étais entre les mains d'une conductrice émérite au volant de son char d'assaut, une Subaro à quatre roues motrices. Je penche mon dossier, je ferme les yeux en lui disant bonne nuit, même si on était en plein jour.

Quand je me réveille, alors que je ne pensais même pas avoir dormi, tout était terminé. La voiture était sur l'accotement et il y en avait plein d'autres plus ou moins amochées éparpillées ça et là. Le vent balayait tout ça, entre soleil et ombre. C'était irréel.

Je sors de la voiture, hébété. Ça ma prendra un peu de temps à revenir sur terre. Comme je vous l'ai déjà dit (peut-être), la cortisone me fait sombrer dans un sommeil où je n'ai conscience de rien.

Je marchais un peu comme un zombie, je n'avais qu'un léger mal de cou, je ramasse les  choses importantes, le chien qui tremble encore de peur sur la banquette arrière et nous nous installons dans la voiture d'une dame qui avait été épargnée par le carambolage.

Petite parenthèse, une carambole est une boule de billard, de là le mot carambolage. Les voitures se frappent et vont dans toutes les directions comme sur une table de billard. Difficile d'avoir une image plus précise.

Ce n'est que plus tard, en voyant des photos de la voiture que je comprendrai à quel point le choc à été violent. L'arrière et l'avant sont enfoncés et le côté du conducteur amoché. Pire, je ne me doutais pas du choc qu'avait du subir G qui a vécu tout ça.

On s'est d'abord fait emboutir par derrière, coup qui nous a déporté vers la voie la plus rapide ou un camion nous a happé avant de disparaitre dans la tempête, nous laissant virevolter sur place avant que nous nous immobilisions sur le côté. On s'est même fait frapper trois fois d'après G.

G sort de la voiture de la dame, elle se sent mal et se jette d'abord tête première dans la neige, puis sur le dos blême comme une morte, elle geint et gémit. Finalement, elle perdra connaissance. Des policiers, des pompiers, des ambulanciers l'entourent , elle se sent de plus en plus mal, ils l'immobilisent dans un carcan, avec couvertures et tout et après un assez long temps, la mettent dans l'ambulance.


De mon côté, je refuse le carcan, je me sentais vraiment bien, comme si rien ne s'était passé. En fait pour moi il ne s'était rien passé. Tout était comme un rêve. On me fait assoir à côté de la conductrice et là, ça prendra une éternité avant de partir, tellement que j'ai eu le temps de ressortir pour prendre des photos.

L'ambulance part, sirène, gyrophares. C'est très glacé, à chaque arrêt on glisse, là, j'ai peur. On arrive enfin.

À l'hôpital, l'ambulancière me dénonce. Lors d'un accident semblable, c'est la règle d'être immobilisé, au cas où. Je finis par accéder à leur demande, sauf que j'aurais dû aller pisser avant.  Ce sera ma seule vraie souffrance. Ils sont tellement débordés qu'ils se fichent bien de ma vessie et comme je suis couché dans un lit avec les barrières remontées, je ne peux me lever par moi-même. Il m'est impossible de bouger, puisque je suis maintenant considéré comme un cas grave et je dois passer scans et rayon x, car G leur a dit que je venais de subir une opération au cerveau.

Croyez-moi, si j'avais eu un problème, ils me l'auraient aggravé, tellement ils me bardassaient. Pas par négligence, mais par inexpérience, je pense. J'ai l'impression que la situation les obligeait à envoyer n'importe qui n'importe où et j'en payais le prix.

Pas de nouvelles de G dont je suis séparé. Je finis par la rejoindre en cachette sur mon tout nouveau Iphone.

Une infirmière un peu bête finit par me donner un urinoir, elle me regarde faire. Vous essaierez de pisser sur le dos dans un lit avec un carcan et une infirmière qui vous observe. Pas facile, mais quel soulagement.

Finalement, le doc nous dit que tout est beau et on nous libère, il est proche cinq heures ou six heures, je ne sais plus.


Taxi jusqu'à un hôtel proche, pas question de revenir ce soir et comment? Nous mangeons un fort bon repas: tartare de saumon crème de maïs et canard sur fagioli. Un peu préparé style peuple, trop gras, trop beurré, mais dans les circonstances bien meilleur qu'un club sandwich. En fait, je mangerai à peu près tout, tout seul, puisque G n'est pas dans son assiette, ça se comprend.

Ensuite, bain tourbillon à deux en mangeant tout seul les deux croustades de pommes du dessert. Elle n'a pas faim moi le Décadron me fait manger comme un ogre.

Notre chienne ira d'abord dans une voiture de la SQ, puis sera adoptée par un pompier volontaire de Saint-Germain-de-Grantham. On ira la chercher chez lui le lendemain avec les beaux parents.

Mon frère qui nous suivait, quand il a vu ce qui se passait,a décidé de prendre le champ volontairement. Mais, comme il n'était pas une urgence, il a dû attendre des heures avant d'être dépanné.

Conclusion, ce n'est pas la neige, ni le vent, ni la glace qui a causé cet hécatombe, mais le fait qu'au Québec on coupe les arbres près des autoroutes (et ailleurs aussi) alors quand la météo s'envenime il n'y a aucun rempart entre la route et les éléments déchaînés.

À suivre...